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DVDEF

Triplets of Belleville, The (édition américaine)

Critique
Synopsis/présentation
Les succès critiques et populaires dans le cinéma d’animation se font de plus en plus fréquent. S’il est vrai que le travail de Dreamworks et de Pixar ont su avec quelques titres (Shrek; Monster’s Inc; Finding Nemo) rapprocher le film d’animation d’un public plus adulte, deux tendances semblent émerger. Tout d’abord du côté des Etats-Unis, une certaine fatigue à sortir de bons dessins animés traditionnels compensée par une excellence inégalé en animation CG. De l’autre, un bastion Nippon de tradition manuelle, porté au succès par des réalisateurs de génie comme Miyazaki et les studios Gibli, ou Satoshi Kon avec des titres très intéressants comme perfect blue, Millenium actress et plus récemment Tokyo Godfather.
Ces deux pôles se permettent de temps en temps de légers écarts afin d’apporter quelques touches originales et ne pas rester enfermé dans un style trop défini, néanmoins cette césure entre les deux techniques offre un panorama de l’animation contemporaines assez fiable.

Rares sont les titres qui s’aventurent dans un mélange harmonieux de ces deux techniques; le plus souvent l’intégration de l’imagerie 3D et de sa propreté toute numérique se fait au dépend de l’unité de l’image, et donne des effets qui dérangent (on peut penser par exemple aux scènes de transferts spatiaux dans cow-boy bebop). Les deux titres qui présentent des intégrations réellement réussies sont actuellement deux lauréats de nominations pour des prix cinématographiques prestigieux. Le plus récent et qui sortira en Août sur les écrans d’Amérique du Nord (et distribué par Dreamworks) sera Ghost in the Shell II : Innocence, est en nomination officielle pour la pPalme d’Or (en concurrence avec un 100% CG, Shrek 2).
Le second, et objet de cette critique, est l'acclamé « Les triplettes de Belleville » qui s’est vu nominé dans de nombreux festivals, en culminant par deux nomination aux Oscars 2004 (Meilleur film d’animation et meilleur thème musical).
Si l'univers du réalisateur des triplettes Sylvain Chomet est bien loin de celui de Mamoru Oshii , ils ont tous deux réussi le magnifique pari tout d’abord technique de marier de manière fluide deux techniques, et aussi celui artistique de présenter des films aux ambiances et au cachet très personnel. Mamoru Oshii baigne dans un neo tokyo sur-technologique, Sylvain Chomet nous ramène quand à lui dans une France des années 50, accompagné de personnages aussi caricaturaux qu’attachants et à la présentation visuelle très originale sans toutefois jamais tomber dans le stylisme pur et dur.
Force de ce film, la consistance ce style et de cette ambiance font aussi de ce film d’animation un réel tour de force. Avec des équipes de productions réparties en France, Italie, et la plus grande partie à Montréal. Gérer une production artistique à distance peut se révéler un facteur de risque non négligeable, mais il semble que Mr.Chomet ait réussi à faire de ce problème un réel point fort, différents animateurs se voyant confier des ambiances différentes à l’intérieur du film, permettant (tout en gardant le fil conducteur) l’expression complémentaire de plusieurs styles.

L’histoire nous transporte donc dans une France des années 1950, ou un petit orphelin gardé par sa grand mère (Portugaise au pied bot) va devenir coureur cycliste et rejoindre « la grande boucle » du tour de France de cette époque (cette époque ou la pharmacopée cycliste se limitait à l’aspirine).
Champion, car tel est son nom, se fait kidnapper sur la route du tour par d’étranges inconnus à la solde de la mafia. Cette mafia est liée à l’import export de vin, et à son grand dirigeant qui souhaite créer des courses « à mise » dans le sous-sol de son bâtiment, situé de l’autre côté de l’Océan, à Belleville.
Accompagné du chien Bruno la grand Mère va partir à sa recherche, rencontrer les fameuses triplettes de Belleville, et tenter de délivrer Champion de ses geôliers.
Si ce scénario n’est pas d’une complexité folle, il est néanmoins largement suffisant pour permettre au réalisateur et à ses équipes d’offrir un long métrage aux ambiances variées, au style très marqué sans toutefois qu’il ne prime sur le divertissement, et de très beaux moments d’émotions, tant visuels qu’auditif. La scène du pédalo, accompagnée par la messe en Do de Mozart est d’une beauté poignante, alors que la représentation du tour de France et de sa caravane permet à ceux qui l’ont connu de retrouver toute une ambiance de liesse populaire vécue (Yvette Horner en prime). Belleville, New-York stylisée et ancrée dans une apparente surconsommation (personnages obèses, statue de la liberté portant un Hamburger etc…), est montrée dans toute sa démesure. De son passé, il ne nous reste que la vidéo d’introduction (le show des triplettes), quelques photos et les vêtements de ce trio de chanteuses.
Le thème des Triplettes, passé en radio et ailleurs jusqu’à une malheureuse saturation, est un hommage non voilé à Django Reinhardt (que l’on voit d’ailleurs dans la vidéo d’introduction jouant de la guitare). Partie immergée de l’iceberg, ce thème est un révélateur très vrai de la qualité de la mise en musique de ce film réalisé par Benoît Charest. Tous les thèmes ou morceaux empruntés sont d’une qualité assez fabuleuse, et les morceaux chantés et bruités par les personnages d’une consistance identique. Comme nous le soulignerons un peu plus dans la section sur la partie audio, si on peut s’émerveiller des visuels, le travail fait sur la mise en scène sonore est de toute beauté, du son d’ambiance aux foleys, aux micro détails sonores, tout a été fait pour que les personnages soient mis en scène d’une manière la plus convaincante possible. C’est certainement ce goût du détail et de la mise en scène plutôt réaliste qui permet de regarder ce film stylisé sans jamais justement ne penser qu’au style, mais plutôt s’immerger dans un univers cohérent, possible et « presque » réaliste.

La force des Triplettes de Belleville reste, tout comme certains grands films d’animation japonais, l’introduction d’œuvre réellement artistiques au grand public. L’animation sort progressivement de sa « case » de divertissement pour enfant et envahit de plus en plus la sphère adulte, avec des thèmes et des constructions plus léchés. Sylvain Chomet et son équipe ont réussis le tour de force d’imposer un style fort et de le voir reçu par un large publique plutôt que par le groupe d’afficionados de l’animation habituel. Nous espérons que cette percée est la promesse de futurs films d’animations originaux et de qualité.

Il est important de noter que les Triplettes de Belleville sont distribuées dans deux langues différentes, Français et Anglais. Cela n’a néanmoins qu’un impact mineur, le film n’ayant pas plus de 4 phrases audibles (dont seules 2 sont traduites vers l’anglais). Par contre les suppléments sont servis dans la langue de Shakespeare, tout comme la présentation de la chanson thème.
C’est l’édition Anglaise qui est ici critiquée, distribuée par Columbia Tristar Home Entertainment. Cette édition est d’un très bon niveau, rendant parfaitement justice au travail de tous les artistes qui ont œuvré sur ce film.


Image
Cette édition est présenté dans un format assez particulier. Si l’original était au format 1.66 :1 cette édition DVD délaisse ce format dès la fin de la vidéo d’introduction pour faire place au 1.78 :1 (transfert 16:9). Pour encore mieux nous perdre, le début du programme présente le redouté "This has been modified to fit your screen".
En fait il semble que le format n’est été respecté que pour la séquence d’introduction, et que le reste du film ait été Zoomé, supprimant ainsi le haut et le bas du format original. Ceci nous semble indélicat, et nous espérons sincèrement que les dérives P&S qui ont été imposées avec les téléviseurs 4:3 ne vont pas tranquillement se transformer en P&S 16:9 afin de satisfaire un nouveau marché.

Une fois cette pilule avalée, on peut se concentrer sur une image réellement magnifique, d’une netteté parfaite, et comme l’on s’y attends pour un film aussi récent, sans aucun problème lié à l’interpositif. Les textures sont parfaitement rendues, et les crayonnés sont d’une précision redoutable, donnant un aspect réellement artisanal à l’image. Les mélanges 2D et 3D sont comme nous le soulignions précédemment très bien intégré, et les textures 3D des modèles (vélos,. roues, etc.) sont excessivement bine rendues (un genre de crayonné des traits CG, une première pour nous).
La très riche et très originale palette de couleur utilisée est rendue avec brio, passant facilement des sépias initiaux aux verts urbains, aux orangés ensoleillés du tour de France pour finir dans les nuances lumineuses de Belleville. Aucun débordement n’a été constaté, et les couleurs toujours adéquatement saturées sont constantes durant toute la durée du programme.
Tout comme les couleurs, la brillance et les contrastes se sont montrées d’un niveau très correcte, et ce quel que fût le type d’ambiance. La scène du pédalo et l’arrivée à Belleville reste ainsi toujours parfaitement détaillée, malgré les fortes variations lumineuses qui sont présentées. Malgré tout certaines scènes nous ont semblé un peu sombre, surtout dans la seconde moitié du film (Belleville)., sans que cela soit réellement gênant. Les parties sombres sont plutôt bien détaillées et les dégradés d’une qualité correcte, les noirs quant à eux sont profonds et purs.

Le transfert ne présente aucun artefacts majeurs, hormis une légère tendance à la sur-définition, qui peut poser parfois quelques problèmes lorsque les crayonnés sont nombreux (entre l’ombre portée, le crayonnage et l’accentuation des contours, certains plans de Bruno le chien laissait apparaître quelques problèmes). Mais ce problème unique ne peut venir gâcher l’excellente présentation qui nous est offerte dans cette édition DVD. Malgré tout, les modifications au format original sont plutôt douteuses, et nous espérons sincèrement que cela ne deviendra pas un standard dans l’industrie.


Son
Deux bandes sons nous sont proposées sur cette édition américaine, toutes deux au format Dolby Digital 5.1. La bande Son Anglaise sera ici critiquée, mais les performances de la bande son espagnole sont très similaires.
Les films d’animation ont en commun qu’aucun son (effets, foleys, ambiance) n’est enregistré lors de la performance. Donner vie visuellement a un univers est quelque chose, mais c’est seulement à travers l’addition du son que cet univers prend une vie palpable, et surtout pour ce genre d’animation très stylisée, nous ramener à une réalité quotidienne, même si celle-cii reste purement acoustique.

Lors de nos premiers visionnements de cette édition, nous avons été littéralement soufflé par ce qui nous paraissait un mix très fin et présentant une ambiance très discrète. Néanmoins, pour la rédaction de cet article, plusieurs autres écoutes nous ont amenées vers d’autres pistes expliquant la séduction que cette bande son savait mettre en pratique.
Si le mix est très dynamique et particulièrement ample physiquement (un déploiement du champ sonore réellement surprenant), il nous a semblé que cet effet était particulièrement lié à deux facteurs. Tout d’abord, puisque les dialogues sont inexistants, le canal central est utilisé de façon permanente pour donner du relief au message des deux avants. De plus, la richesse des détails de cette bande son, particulièrement concentrés dans le canal avant permettent un réalisme vraiment impressionnant qui, et c’est sa plus grande qualité, ne se remarque jamais. C’est cette profusion de détails sonores, de textures aussi ordinaires que fidèlement enregistrées, qui nous a trompé dans nos premières impressions, mais qui continue à nous tromper en s’effaçant complètement pour ne laisser qu’une impression de vrai.

Ces éléments sonores sont parfaitement intégrés, tout comme la trame sonore qui sait se mettre en avant avec réalisme. Des scènes comme la chanson improvisé sous le pont avec les triplettes et grand Mère qui joue de la roue de vélo montre non seulement de belles qualités musicales, mais aussi un réalisme d’effet surprenant (les pas rythmiques dans le sable, non loin du gumboot). La trame sonore est conçue à plusieurs moments comme un collage harmonieux de sons, capable tout aussi bien de créer l’action à l’action, de la supporter ou bien de se faire oublier complètement pour mettre en avant les personnages. Il convient de noter aussi le passage de la traversée en pédalo, qui soutenu par un morceau de musique classique (Messe en Do de Mozart) sait faire exploser toutes les qualités (ou défauts) du système du son. Cette association d’image et de son a su nous émouvoir, les basses rondes, les chœurs hauts perchés et l’aide du canal d’infrabasse pour souligner le bas du registre, ne sont certainement pas étranger à cette sensation.
Les canaux arrières sont utilisés de manière parcimonieuse et efficace, sachant donner de l’ampleur et une immersion plutôt convaincante. Le son se déploie sur un vrai 360 degré, les transitions sont plutôt convaincantes et toujours précises.
Les basses sont rendues de manière très satisfaisante à l’instar de l’ensemble du spectre sonore. Les fréquences d’extrême grave sont elles aussi convenablement intégrée, venant souligner tant des événements sonores que des passages musicaux.

Tout comme l’imagerie 3D parfaitement intégrée, la trame sonore et les effets réussissent le double défis d’être d’un réalisme, d’une précision et d’une richesse surprenante sans jamais donner l’impression d’être trop propres ou trop « studio ». La trame sonore, très riche est parfaitement restituée et contribue elle aussi au réalisme de ce film.
Nous sommes tombés sous le charme de cette bande sonore, qui si elle ne déploie pas les quatre mégatonnes de décibels et d’effets qu’on peut retrouver sur des mixages à la Lord Of The Ring ou des films d’actions à la Matrix, donne un rendu très fidèle. Cette bande son permettra à notre avis de tester la « fidélité » de votre système de son, la source est très réaliste, reste maintenant à vérifier si le résultat le sera.
A noter la présence exclusive de sous titres anglais.


Suppléments/menus
Cette édition des Triplettes de Belleville se compose d’un unique disque, contenant le programme principal, et les trop rares suppléments fournis. Notez que cette édition présente tous les suppléments en anglais (Chomet utilisant son anglais le plus dur, les autres bénéficiant d’un sous titrage anglais).
Deux segments sont offerts en guise de complément à ce film. Tout d’abord, le traditionnel segment sur la production, qui présente en une quinzaine de minutes les principaux acteurs de cette production, quelques anecdotes et la vision du réalisateur. Ce segment quoi qu’apportant quelques précisions souffre surtout de sa durée. Quinze minutes ne permettent qu’un survol très lointain tant des artisans que des résultats, et c’est réellement sur notre faim que nous sommes passés au deuxième segment, encore plus court.
« The cartoon according to director Alain Chomet » nous permet en environ 6 minutes de voir le réalisateur nous donner sa vision à propos de l’animation face aux autres arts graphiques, qu’il s’agisse de la spécificité temporelle de l’animation, ou bien de la technique manuelle de dessin. Là encore, on sent que quelque chose aurait pu se passer, mais que le temps ne permettait pas de développer plus avant. Ces deux segment sont plutôt décevant, et auraient mérités plus de consistance.
En plus de la vidéo du thème musical (en anglais là aussi) et de la traditionnelle bande annonce, on trouve trois segments commentés par différents artisans de la production. Si les scènes choisies et les commentaires sont là aussi intéressant, on retrouve la même frustration que pour les premiers éléments. Pourquoi ne pas avoir fait l’effort d’une piste de commentaire avec quelques personnes sur toute la longueur du film ? Au lieu de cela, ce sont trois cènes plutôt courtes (la plus longue faisant 7 minutes) qui nous laisse une fois de plus sur notre faim.

Après le régal du programme principal, on est malheureusement un peu déçu par les suppléments fournis sur cette édition, qui n’offrent pas le niveau d’information habituel aux productions récentes. Il aurait été très intéressant de voir comment la gestion du projet au niveau international a été menée, d’avoir des segments sur les récompenses et la cérémonie des oscars (d’entendre Benoît Charest parler sur Radio Canada à l’émission Bachibouzouk deux semaines avant la cérémonie, on sentait que c’était important, et que ce compositeur avait pas mal de choses à dire). Nous espérons qu’une future édition saura développer plus avant sur les thèmes seulement abordés ici.



Conclusion
Les Triplettes de Belleville ont su faire sensation lors de leur sortie. Une ambiance visuelle très stylisée appuyée par une animation de qualité était mise au service de personnages hauts en couleurs. Le résultat visuel, issu du mariage de différentes techniques, est très convaincant et sait servir adéquatement l'histoire. La bande son, et plus généralement tout le design sonore rehaussent encore plus l'excellence de ce film.

Cette édition DVD vous offrira de très belles performances pour le programme principal, néanmoins les suppléments, peu nombreux et définitivement trop cours risquent de frustrer les amateurs. À part ce léger problème, cette édition mérite largement sa place dans toute vidéothèque d'amateur d'animation, si ce n'est pour son originalité, au moins pour son excellence.


Qualité vidéo:
4,1/5

Qualité audio:
4,3/5

Suppléments:
2,5/5

Rapport qualité/prix:
4,0/5

Note finale:
3,9/5
Auteur: Thomas Geffroyd

Date de publication: 2004-05-17

Système utilisé pour cette critique: Téléviseur Sony KV34XBR910; Préampli Audio Refinement par YBA Pre-2; Ampli Audio refinement par YBA Multi-5; Enceintes JmLabs; Sub REL Strata III; Lecteur DVD Denon DVD-1600; cables et interconnects Cardas/Audioquest.

Le film

Titre original:
Triplettes de Belleville, Les

Année de sortie:
2003

Pays:

Genre:

Durée:
100 minutes

Réalisateur (s):

Acteur (s):
-

Le DVD / Blu-ray

Pochette/couverture:

Distributeur:
Columbia Tristar

Produit:
DVD

Nombre de disque:
1 DVD-9 (simple face, double couche)

Format d'image:
1.78:1

Transfert 16:9:
Oui

Certification THX:
Non

Bande(s)-son:
Anglaise Dolby Digital 5.1
Espagnole Dolby Digital 5.1

Sous-titres:
Anglais

Suppéments:

Date de parution:
2004-05-18

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