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Le 4K: prématuré ou incontournable?

Dossier
Vu de France, le 4K (résolution horizontale de 4000 pixels) reste une perspective exotique. Sony vient de présenter à Beauvais une projection en 4K du film de Jacques Perrin et Jacques Cluzaud Océans.

Tourné majoritairement en 35mm pour les prises de vues en surface et en numérique pour les prises de vues sous-marines (caméras Sony F900, HDC 1500 et HKC T1500), le film a été post-produit en 4K. Curieusement le 35mm a connu des manipulations conséquentes : les fichiers 4K ont dû être débruités pour s’harmoniser avec le numérique. Digimage a utilisé un logiciel propriétaire. Les résultats: absence de grain et de bruit dans des images contenant beaucoup de plages quasi uniformes- sont spectaculaires. D’après Philippe Ros, responsable technique des filières images, le logiciel est meilleur que le module Relativity d’Arri.

A 8m d’un écran de 18m de base, impossible de discerner une différence de résolution entre analogique ou numérique. D’infimes bulles filmées en HD semblent à la limite de la résolution de la copie. En fait cela semble une contre-démonstration pour le 4K : de toute évidence une capture en 2k (et même en l’occurrence en 1920x1080) suffit, elle est même compatible avec du 35mm numérisé en 4K !

En fait, c’est moins la résolution brute qui donne l’impression de netteté que l’acutance, le contraste dans les micro-détails. Dans la filière d’acquisition utilisée, à la résolution HD il est au moins équivalent, voire supérieur, à la chaîne argentique. C’est la zone de résolution utile. La sur-résolution d’une image 4K n’est – théoriquement et au mieux- perceptible que pour des spectateurs très proches de l’écran (champ couvert par l’écran d’au moins 68°), elle est indiscernable dès le 1er tiers d’une salle. Le convertissement ascendant des sources HD et les traitements associés ont surtout permis d’harmoniser les rendus et d’ajouter des effets de profondeur. Le gain visible est sans doute moins dans la résolution absolue que dans la pleine exploitation de l’image, y compris 2K.

Sony s’est-il alors tiré une balle dans le pied en démontrant… la qualité du 2K ?

Pas à propos de la qualité de ses caméras en tout cas, mais pas non plus à propos de la projection 4K.

D’abord cette valorisation du 2K, qui va très au-delà d’un simple convertissement ascendant, a demandé une post-production longue et complexe, donc chère : on n’imagine pas autant d’investissement sur tous les films tournés en numérique.
Le processus exploite au mieux les ressources du 35mm, un peu comme les gonflages en IMAX DMR : on voit incontestablement plus de chose que sur une copie issue de la filière argentique ou d’un DI 2K. La filière post-production + projection 4K est la seule qui rende pleinement justice au tournage 35, même si Arri a démontré que la chaîne Film S35 + numérisation 4K n’atteint pas la résolution 3K ! (résolution limite : 57 cycles/mm). Cela seul suffit à justifier le passage à la projection 4K.

Mais le potentiel qualitatif n’est atteint qu’avec les tournages 4K ou les reports de 70mm. Sony proclame à l’envie qu’il n’y a pas de véritables caméras 4K mais les performances de la Red (ou de feu la Dalsa sur Alice au pays des merveilles de Tim Burton) constituent déjà un saut qualitatif incontestable. En court-circuitant la FTM de la pellicule le numérique améliore le rendu des détails utiles. Toutefois ce sont les reports d’IMAX qui démontrent le mieux tout ce dont une projection 4K est capable. Même le 70mm classique n’est pas à la hauteur. L’extrait de Sound of music (Robert Wise) vu en décembre à Londres était granuleux et mou, celui de la Vistavision de North by NorthWest (A. Hitchcock) vu à Beauvais granuleux. Ce sont de vieux films ? Même le remarquable Baraka (Ron Fricke), pourtant restauré en 8K, montre des défauts reconnaissables (notamment une très légère instabilité).

Seuls les reports à partir d’IMAX (des extraits de Dark Knight de Chris Nolan par exemple) semblent permettre de tutoyer les limites du 4K. Logique : les défauts d’instabilité très faibles profitent de la stabilité absolue du numérique et la très grande surface du négatif a pour conséquence un contraste extrêmement élevé des micro-détails. Ils deviennent beaucoup plus perceptibles dans la zone 2K du spectre et l’image semble plus détaillée, même si on est trop loin pour voir tous les détails d’une image 4K.

Le 4K constitue clairement un saut qualitatif. De même que le DVD a permis de ressusciter de vieux films, le 4K permettra de découvrir une qualité que les copies 35mm ou même 2K n’exploitent pas.

Sans compter que les projecteurs Sony (et probablement les projecteurs DLP 4K qui arrivent) permettent une projection 2k 3D de haute qualité, les 2 images étant projetées simultanément.

La France est restée longtemps debout sur les freins en matière de projection numérique (il a fallu Avatar pour que le groupe UGC comprenne et décide d’équiper 600 salles). Paradoxalement c’est peut être une chance pour les exploitants : pourquoi passer au 2K quand on peut passer au 4K pour 67 575 euros ?

Plus de 11000 salles américaines ont déjà fait ce choix, tout exploitant peut se poser la question : un autre choix que le 4K est-il viable sur le long terme ?

Et les consommateurs de Blu-ray dans tout ça ? Le 4K est une réponse au relief mais aussi au Blu-ray : la super-résolution dans votre salon n’est pas pour tout de suite, il faudra aller en salle un moment encore.

Reste que tourner eu très haute résolution (4K ou mieux encore IMAX) donne aux images Blu-ray une qualité toute particulière. Dark Knight par exemple recèle plusieurs séquences d’origine IMAX qui allient absence totale de bruit ou de grain, contraste extrême dans les plus fins détails (des éclats de la vitre qui explose au début font UN pixel !) et la qualité de modulation de la profondeur de champ propre que seuls permettent les grands formats.

Un simple DVD permet de sentir la différence entre un film 35mm et un 70mm, qui ne tient pas à la résolution brute que le DVD est incapable de rendre. Pour le Blu-ray autant que pour les salles 4K la chose est claire : vive l’IMAX !



Auteur: Guy-Louis Mier
Date de publication: 01/05/2010
Dernière révision: 01/05/2010