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DVDEF

Singin' In the Rain (Two-Disc Special Edition)

Critique
Synopsis/présentation
Pour plusieurs, Singin' in the Rain n'évoque que la célèbrissime séquence où Gene Kelly y va d'un numéro sous la pluie. Pourtant, cette co-réalisation de Gene Kelly et Stanley Donen a bien plus à offrir que de simples numéros de danses. À l'instar de Sunset Boulevard (Billy Wilder), Barton Fink (Joel et Ethen Coen) ou plus récemment Mulholland Drive (David Lynch), Singin' in the Rain est une réflection sur le monde hollywoodien.

Ce film fut produit en 1951, à un moment que nous pourrions appeler l'âge d'or de la MGM (qui se situe de la fin des années trente au début des années soixante). À cette période, Arthur Freed (1894-1973) et son équipe (le Freed Unit) étaient les maîtres absolus de la comédie musicale. Arthur Freed fut d'abord pianiste-accompagnateur à l'ère du muet puis, à l'orée du cinéma parlant, devint parolier et compositeur (The Broadway Melody (1929), San Francisco (1936), Meet Me in St. Louis (1944)). Mais c'est en tant que producteur pour la MGM qu'Arthur Freed fit sa marque, son premier film à ce titre fut The Wizard of Oz (il en était le producteur-associé). Initiallement, Singin' in the Rain ne devait être qu'une production de moyenne envergure (scénarisée par Adolph Green et Betty Comden) réunissant certaines chansons de Freed écrite vingt ans plus tôt. Mais voyant le succès d'An American in Paris (Vincent Minnelli), on décida à la MGM de capitaliser sur ce succès en donnant à Singin' in the Rain plus d'envergure. La réalisation du film fut conjoitement assurée par Stanley Donen (ancien chorégraphe passé à la réalisation) et Gene Kelly qui, contrairement à ce qu'il a généralement admis, prît part activement à la mise en scène du film (et non seulement qu'à la conception des numéros de danse).
L'histoire prend place à la fin des années vingt où le cinéma muet vit ses dernières heures. Don Lockwood (Gene Kelly) et Lina Lamont (Jean Hagen) sont les deux stars de la Monumental Pictures. Pressée par l'immense succès de The Jazz Singer, premier film parlant, la Monumental Pictures doit réagir. Le prochain film de ses deux vedettes (The Duelling Cavalier) sera parlant! Si la voix de Lockwood est nette et agréable, celle de Lamont est vulgaire et stridente, à moins de six semaines de la sortie de ce nouveau film il faut trouver une solution. Kathy Selden (Debbie Reynolds), une comédienne dont Lockwood est tombé amoureux, doublera la voix Lina Lamont... Avant d'être une réflection sur Hollywood, Singin' in the Rain en fait d'abord l'histoire. Le film s'ouvre sur l'arrivée de Lockwood et Lamont à la première de leur nouveau film. Une émule de Louella Parsons, présentatrice de la soirée et journaliste d'un tabloïd, acceuille les deux stars et demande à Lockwood d'évoquer aux fans en délire ses débuts à Hollywood. Du coup, par flash-back, la biographie de Lockwood est aussi une mise en scène de l'histoire d'Hollywood.

Le ton de Singin' in the Rain est sarcastique, et le duo Donen/Kelly se moque de tout: de la presse (qui tire profit du système), des stars (par le personnage de Lina Lamont) et de l'industrie (attachée à préserver l'illusion). Bien sûr, ce film parle de la transition du muet au parlant et toutes les implications que cela eu sur l'industrie. Mais Singin' in the Rain joue habilement sur un idée plus fondamentale; celle de la représentation. La première séquence est, encore là, révélatrice. Les mots qu'emplois Lockwood idéalisent son ascention au firmament hollywoodien, alors que les images montrées sont celles d'une vérité plus difficile. Les références à cette dualité entre le vrai et faux sont récurantes: Kathy Selden qui double Lina Lamont, le personnage de Cosmo Brown (Donald O'Connor) qui danse sur un faux mur, l'illusion d'amour entre Lamont et Lockwood, etc.

Certains ont critiqué une des dernières séquences du film, le Broadway Melody, à qui ont reproche de réutiliser la formule employée dans An American in Paris et sa longueur. Bien sûr, il existe certaines similarités, mais les fonctions en sont différentes. Le Broadway Melody dans Singin' in the Rain fait une double mise en abîme en reprenant, mais cette fois mis en scène, la thématique de l'oeuvre (la réalisation du rêve).

Singin' in the Rain est un film résolument optimiste, tandis que Sunset Boulevard (Billy Wilder), tourné un an plus tôt, jetait un regard beaucoup plus sombre sur la communauté hollywoodienne. Cette réalisation, malgré des pointes d'humour et un sarcasme évident, célèbre tout de même la force d'Hollywood. Singin' in the Rain, en plus d'être esthétiquement superbe (danses, décors, etc.), a le mérite d'offrir un point de vue. Claude Chabrol, alors jeune critique aux Cahiers du Cinéma, avait écrit: "il s'agit bien, cette fois, d'un film d'auteur, ce qui est rare dans ce genre de production". Bien des décennies ont passées et ces mots sont encore aussi à propos.


Image
Précisons, en premier lieu, que le terme Technicolor dénomine plusieurs procédés. Le procédé classique, utilisé pour Singin' in the Rain, impliquait l'utilisation d'une caméra munie d'un prisme décomposant l'image en faisceaux. Trois négatifs étaient exposés simultanément, chacun enregistrant une couleur disticte (jaune, magenta, cyan). Insérés par la suite dans une tireuse, on procédait avec ces négatifs à un transfert de couleurs (dye transfer) sur une base celluloïd, constituant du coup la copie de production. À titre indicatif, ce procédé fut abandonné au début des années cinquantes au profit d'une pellicule monopack. Pourquoi? Les pellicules monopack (un seul négatif) avait évoluées au point d'offrir une aussi grande justesse des couleurs que le permettait un procédé par transfert de couleurs (dye transfer).

Idéalement, Warner aurait utlisé les trois négatifs originaux en vue de ce transfert, mais ceux-ci ont brûlé en 1978. Warner n'a donc pas eu le choix d'utiliser des copies (première génération) de ces négatifs. Singin' in the Rain est le premier titre de la Warner a tiré profit d'un nouveau procédé nommé Ultra-Resolution. En vue de ce transfert, chacun des négatifs (jaune, magenta et cyan) a été numérisé, formant un total de 443,424 images. Puis ces numérisations ont été recomposé électroniquement pour former les 147,808 images couleurs composant ce transfert. Il semble parfois que ce registre numérique au fait perdre une partie de l'image, environ 4%. On a par la suite nettoyé numériquement les taches et parasites. L'équipement informatique utilisé a permis un alignement parfait de chacune des trois numérisations composant chaque image. L'Ultra-Resolution solutionne un des plus proéminents problèmes du Technicolor: gardé à un registre parfait toutes les images. En fait, le résultat final laisse voir une image probablement plus précise que vue lors de la sortie du film. Toutefois, il ne s'agit pas ici d'une véritable restauration du film mais bien d'un reconditionnement numérique. Ce nouveau transfert numérique a été montré récemment aux États-Unis via un projecteur DLP et les avis sur ce reconditionnement sont partagés: on souligne, par exemple, que les parties sombres et les noirs n'auraient pas la même richesse qu'une vraie copie Technicolor 35mm (pellicule). Comme très justement soulignée par Robert Harris (on lui doit les restaurations de Vertigo, Lawrence of Arabia), une différence doit être faite entre le reconditionnement d'une image destinée à un support vidéo et une véritable restauration destinée à être projetée sur un écran. Sous cet angle, le travail fait par Warner sur Singin' in the Rain est pratiquement un sans faute. Est-ce que toutefois l'image obtenue équivaut une véritable pellicule Technicolor projetée en salle? Probablement que non.

Singin' in the Rain était déja paru en format DVD il y a quelques années chez MGM. Tout comme la première édition, l'image est présentée au format respecté de 1.37:1, mais là s'arrête les comparaisons tant cette nouvelle édition impressionne.

Rarement aura-t-on vu une image aussi surprenante pour un film du début des années cinquante. L'image est nette, précise offrant un niveau de détail optimal. Les couleurs sont, sans l'ombre d'un doute, les grandes bénéficiaires de ce reconditionnement numérique. Celles-ci ont retrouvé tous leurs aplombs. L'agaçante dominance rougeâtre qui caractérisait le transfert MGM a été corrigé. Enfin, la très riche palette de couleurs marquant la photographie est justement reproduite. Les couleurs sont riches, brillantes et pleinement saturées. Un étalonnement de référence!

Le niveau des noirs (la brillance) est parfaitement ajustée, à peine observe-t-on quelques rares fluctuations. Les parties sombres offrent des dégradés subtils, bien détaillés et appuyés par des noirs intenses. Le contraste, trop accentué avec l'édition MGM, est ici sans problèmes.

Malgré l'important travail numérique effectué, l'image a une apparence filmique. Aucune trace de compression, effet d'escalier ou surdéfinition des contours (évidentes avec l'édition MGM) n'entâche ce transfert.



Son
Cette édition offre trois bandes sonores: les mixages originaux mono (Dolby) anglais et français ainsi qu'un nouveau remixage anglais Dolby Digital 5.1.

Le nouveau remixage anglais Dolby Digital 5.1 est la plus intéressante de ces bandes sonores. Il s'agit ici d'un enregistrement à l'origine monophonique, il aurait donc été malheureux que ce remixage en travestisse l'esprit. C'est à la Chace Productions que Warner a confié ce remixage. Le travail fait est à la hauteur, donnant un peu plus de dynamisme et de profondeur à l'ensemble que la bande-son mono d'origine. Le champ sonore se déploi essentiellement du canal central avant. Les canaux gauche/droit et arrières sont utilisés avec réserves, simplement pour créer un espace sonore plus enveloppant. Malgré les cinquante ans de cette production, la fidélité étonne, notammment au niveau des cuivres (trame-sonore). Les voix sont correctement rendues, toujours intelligibles et nettes. Les basses n'ont pas la force d'une production contemporaine, mais ce remixage multicanal leurs a donné un peu plus de vigueur.

Vous trouverez aussi des bandes-son anglaise et française Dolby mono. Il y a option de sous-titrage en anglais, français et espagnol.



Suppléments/menus
Avec Unforgiven, True Romance, Amadeus, One Flew Over the Cuckoo's Nest et cette édition, Warner amorce la ré-édition de titres parus au premier temps du format DVD (1997-1998). Deux disques composent cette édition spéciale de Singin' in the Rain, chacun incluant son lot de suppléments.

Deux suppléments peuvent accompagner l'écoute du film: une piste de commentaires audio ou la possibilité de visionner de courts segments informatifs. Pour accèder aux segments informatifs, vous devrez préalablement activer cette option en allant à Singin' Inspirations via le menu Special Features. Au cours du visionnement, un îcone apparaîtra au bas de l'écran, sporadiquement, vous permettant de visionner un segment (extraits d'archive, entrevue, etc.) ayant trait à la séquence. Nous n'avons jamais été les plus grands fervents amateurs de ce genre d'option qui brise l'écoute d'un film. Peut-être le seul faux pas de cette édition, ces capsules n'ont pas été regroupées dans une section distincte.

La piste de commentaires audio est animé par Debbie Reynolds. En fait, l'actrice se contente de présenter les commentaires d'intervenants animant cette piste (Stanley Donen, Debbie Reynolds, Donald O'Conner, Cyd Charisse, Kathleen Freeman, Betty Comden, Adolph Green, Rudy Behlmer et Baz Luhrmann). Les commentaires n'ont pas été enregistré en studio, mais bien extraient d'entrevues données par ces différentes personnes. Les commentaires suivent rarement l'action vue à l'écran, mais restent toujours informatifs quoique souvent anecdotiques. Le plus captivant des tous les animateurs/trices est Rudy Behlmer, historien du cinéma. On aurait aimé qu'une piste de commentaires audio lui soit entièrement consacrée.

The Reel Sound est un sympatique supplément qui permet d'en apprendre un peu plus sur ce que fut la transition du cinéma muet au parlant. On évoque cette transition via de courts textes et extraits de quatre films: Don Juan (1926), The Jazz Singer (1927), The Lights of New York (1928) et The Broadway Melody (1929). Les textes sont rudimentaires, le spécialiste n'y trouvera pas nécessairement son compte. Toutefois, il s'agit d'un travail de synthèse honnête.
La bande-annonce (restaurée) de Singin' in the Rain, les prix remportés par cette oeuvre et une liste des principaux acteurs/artisans complètent ce premier disque.

Le deuxième disque, composé uniquement de suppléments, s'ouvre sur un très long documentaire nommé Musicals Great Musicals (titre complet: Musicals Great Musicals: The Arthur Freed Unit at MGM). Ce documentaire n'a pas été produit à l'intention de cette édition. Datant de 1996, Musicals Great Musicals (86'03), comme son titre l'indique, retrace l'histoire de Arthur Freed et de son équipe à la MGM. André Prévin, Cyd Chariss, Vincente Minelli, Betty Comden, Adolph Green, Stanley Donen, Mickey Rooney et Leslie Caron: voilà quelques-unes des personnes qui évoquent leurs collaborations avec le producteur. De Wizard of OZ (Victor Fleming, 1939) à Gigi (Vincente Minnelli, 1958), toutes les plus importantes productions de Freed sont abordées en expliquant les rouages du célèbre Freed Unit. Bien documenté et proprement fait. Notons que ce documentaire à été séparé en chapitres (20) et est présenté au format 4:3. Des sous-titres optionels en français auraient été souhaitable.

What a Glorious Feeling (35'33) est entièrement consacré à la réalisation de Singin' in the Rain. Là encore, c'est Debbie Reynolds qui anime ce supplément. Ce documentaire, réalisé par Peter Fitzgerald, recompose les étapes entourant la production de ce film: des décors au scénario. Des entrevues en compagnie de Stanley Donen, Donald O'Connor, Kathleen Freeman, Rudy Behlmer entrecoupées d'extraits du film et de segments d'archives peuvent être vus. What a Glorious Feeling n'est ni mieux ni pire que tout les documentaires promotionels produits par l'industrie hollywoodienne. Toutefois, le ton affecté de Debbie Reynolds finira par en agacer plus d'un. De plus, il y a certaines inexactitudes: par exemple, le succès de Singin' in the Rain ne fut pas aussi éloquent qu'on veut bien le dire. La reconnaissance de film (à l'instar de Citizen Kane) est venue au fil du temps...

Avec Excerps From Where the Songs Originated, justice est rendue. Les douze extraits de films où furent entendus pour la première fois les chansons interprétées dans Singin' in the Rain sont inclus. Chaque chanson est précédée d'un court texte explicatif.

You Are My Lucky Star est la seule séquence rejeté du film à avoir survécu. Elle est ici présentée dans son intégralité (4'04).

Scoring Stage Session ravira les plus fervents amateurs de Singin' in the Rain. C'est exactement dix-huit enregistrements audios de douze chansons différentes interprétées au cours du film (You Were Meant for Me, Moses Supposes, Fit as a Fiddle, All I Do is Dream of You, You Are My Lucky Star, Would You?, Good Morning, Beautiful Girl, Make 'Em Laugh et Singin' in the Rain. La qualité des enregistrements varie mais l'ensemble est un bel ajout à cette édition.

Complètent finalement les suppléments de ce deuxième disque une galerie d'images (16) qui semblent avoir été offerte plus pour la forme que par soucis de référence.

Le menu principal du deuxième disque permet d'accéder à un oeuf de Pâques. Cliquez ici pour voir comment y accéder.






Conclusion
Voilà une très belle édition d'un film qui le méritait amplement. L'image ravira les plus éxigeants, l'extraordinaire palette de couleur est superbement reproduite. Le travail fait sur la bande-son mono ajoute un peu plus de vigueur au mixage original, mais sans en changer l'esprit. Une analyse un peu plus plus poussé du film aurait certainement contribué à faire des suppléments une référence. Mais quoi qu'il en soit, ceux-ci demeurent de très bonne facture.




Qualité vidéo:
4,5/5

Qualité audio:
3,9/5

Suppléments:
4,0/5

Rapport qualité/prix:
4,7/5

Note finale:
4,4/5
Auteur: Mathieu Daoust

Date de publication: 2002-09-24

Système utilisé pour cette critique: Téléviseur NTSC Widescreen 16:9 Toshiba TheaterWide TW40X81, Récepteur Pioneer Elite VSX-07 TX, Lecteur DVD Pioneer Elite DV-37, enceintes Paradigm, câbles Monster Cable.

Le film

Titre original:
Singin' In the Rain

Année de sortie:
1952

Pays:

Genre:

Durée:
103 minutes

Réalisateur (s):

Acteur (s):

Le DVD / Blu-ray

Pochette/couverture:

Distributeur:
Warner Bros.

Produit:
DVD

Nombre de disque:
2 DVD-9 (simple face, double couche)

Format d'image:
1.33:1

Transfert 16:9:
Non

Certification THX:
Non

Bande(s)-son:
Anglaise Dolby Digital 5.1
Française Dolby mono
Anglaise Dolby mono

Sous-titres:
Anglais
Français

Suppéments:
Piste de commentaires audio, documentaires (2), galerie d'images, liste des artisans, segment portant sur les films ayant marqués la transition du cinéma muet au parlant, prix remportés par le film, enregistrements audios des chansons interprêtées, bande-annonce et scène inédite

Date de parution:
2002-09-24

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