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DVDEF

Sawako - Dolls

Critique
Synopsis/présentation
Bien que connu sous différents noms, Takeshi Kitano (parfois appelé Beat ou Bito Takeshi) est un artisan très prolifique de l’industrie du cinéma et de la télé Japonaise. Auteur, réalisateur, acteur, peintre, poète et écrivain, Takeshi Kitano, rendu célèbre grâce a une émission télé (The Two Beats, de laquelle il a gardé son surnom d’acteur « Beat »), a depuis exploré de nombreuses facettes du cinéma, et le plus souvent avec un beau succès populaire.

Ses films les plus connus sont ceux qui mettent en scène des histoires, généralement violentes, de gangstérisme Yakusa (Sonatine; Violent Cop). Déjà dans ces films, Kitano abordait la réalisation dans un rythme et une photographie que l’on pourrait qualifier de typiquement japonaise. Les dialogues plutôt rares et généralement décalés par rapport à la culture occidentale (les silences là ou nous parlerions, et les dialogues là ou Hollywood imposerait un silence) sont déjà présents, et les plans à tendance symbolique sont déjà là.
Ses mises en scènes, surtout sanctionnées par le succès international de Hana-Bi en 1997, sont supportées par son propre jeu d’acteur, terriblement froid mais capable de faire passer beaucoup d’émotion. Suite à un grave accident automobile, Kitano a commencé à faire des films orientés différemment. Ses récentes productions, tels « Brothers » ou « Kikujiro » étaient plus sentimentaux et parfois même léger. Certains amateurs Occidentaux de la première heure ont vu là une espèce d’adoucissement de ce réalisateur, mais si le fond changeait, passant de policier torturé dans Hana-bi ou Yakusa dans Sonatine à tuteur sentimental dans Kikujiro, la forme restait la même. Actuellement sur les écrans d’amérique du Nord, le dernier film de Kitano, Zatoichi, se veut une espèce de synthèse de ces deux époques.

La découverte de Kitano pour la peinture semble avoir néanmoins eue un impact sur sa mise en scène. Les plans symboliques à la photographie et à la composition très travaillées sont devenus centraux, imposant un rythme et une poésie qui tout en puisant largement dans la culture japonaise sont devenu la marque de ce réalisateur.
Toutes ces évolutions sont matérialisées dans Dolls, écrit et réalisé par Kitano en 2003. Dolls se situe aux antipodes d’un Sonatine, la structure narrative toujours nette est néanmoins beaucoup plus articulée, le rythme est particulièrement lent, et la symbolique omniprésente. Dolls se compose de trois histoires, toutes des mises en scènes d’une même tragédie, Meido No Hikyaku (Le Courrier de l’Enfer) par Monazemon Chikamatsu (1653-1725). Cette dernière nous est contée au début du film à travers un spectacle de marionnette traditionnel (Bunraku), où un conteur et des marionnettistes (jusqu’à 3 par personnages) personnifient un couple qui se déchire.
Les trois histoires du films sont en fait des redites de cette tragédie, et sont articulées autour de la première. Après une promesse de mariage à Sawako (Miho Kanno), Matsumoto (Hidetoshi Nishijima) se fait convaincre d’épouser la fille de son patron. Sawako désespérée tente de se suicider, mais s’en sort avec des lésions cérébrales irréversibles. Matsumoto abandonne la cérémonie de son mariage, et décide de s’occuper de Sawako. Débute une vie de vagabondage pour ces deux, reliés par un fil rouge (symbole de l’amour au japon), qui errent dans un japon aux quatres saisons jusqu’à un dénouement tragique.
C’est en suivant occasionnellement ce premier couple, que l’on croise la seconde histoire, celle d’un Yakusa qui longtemps avant avait rencontré l’amour, mais qui s’en était éloigné. La femme qu’il avait rencontré a l’époque, lui avait promis de revenir lui apporter son diner tous les samedis. Des années plus tard, Hiro revient sur ce banc ou il avait connu l’amour, et découvre que la promesse faite était toujours respectée.
La troisième histoire est basée autour du culte des pop-stars japonaise. Haruna, ancienne pop-Idol a subit un grâve accident qui l’a défigurée. Un de ses plus fidèles admirateur, décide de s’enlever la vue afin de garder pour image seulement celle de la Haruna qu’il a tant admirée. Nukui devient donc le seul fan que cette dernière veut bien rencontré, et lui redonner un peu de cet amour qu’elle a perdu par la force du destin.

Ces trois histoires sont toute liées à l’histoire du théatre Bunraku qui nous est contée au début du film, et ces histoires vont donc se terminer tragiquement (la mort). L’analogie entre le théatre et la vie est magnifiquement souligné dans les costumes réellement magnifiques portés à la fin de l’histoire de Sawako. Tout se passe comme si les marionnettes, plutôt que d’être celles qui symbolise l’histoire du drame humain, étaient celles qui l’observaient, et fatalement voyait la conclusion tragique arriver.
Cette distanciation, bien qu’elle ne soit pas à proprement une mise en abîme, permet de placer le réalisme de ces histoires dans un environnement légèrement décallé. Ce décalage, est fortement révélé par la poésie des images et des symboles qui les compose, tout autant que par le rythme. La photographie est magnifique et certains plans sauront rappeler des scènes de Kurosawa ou de Wenders, tout autant dans le soin de la composition et de l’éclairage que dans le l’onirisme qui se dégage de la plupart des scènes. Car Dolls est un film d’auteur qui cherche à séduire par l’image. Les traitements de la même histoire semble d’ailleurs rappeler que le fond et la forme peuvent être séparés, et que la forme artistique donnée au fond peut faire la différence. Cette approche est celle aussi du théatre Bunraku, qui présente l’histoire de la manière la plus réaliste possible, la plus belle possible dans les gestes et le jeu, alors que la narration est confiée au conteur qui lui ne joue pas (appelé un Tayu, pas oppoistion au Shamisen qui lui est l’opérateur de la poupée).

Kitano en tant qu’écrivain et réalisateur se pose dans les deux fonctions traditionnelles, il raconte l’histoire qu’il présente. Il est lui même à la fois Tayu Shamisen, et lorsque les deux personnages principaux enfilent les costumes traditionnels, le lien entre la tradition théatrale et le cinéma, la tradition séculaire et la contemporanéité et le lien entre le fond et la forme semblent se rejoindre. Il semble que Dolls soit un film important dans la carrière de Kitano puisqu’il semble faire le lien entre la modernité de son cinéma et les bases de sa culture Japonaise, sans qu’aucun ne trahisse l’autre.
Le réalisateur sait aussi s’entourer, la direction artistique de Norihiro Isoda est magnifique tout comme la photographie de Katsumi Yanagishima. On peut aussi remarquer la trame sonore du film, composée par Joe Hisaishi qui offre un magnifique écrin aux images, et boucle une réalisation mature et très artistique. Takeshi Kitano montre son talent de cinéaste dans Dolls, et sa mise en scène démontre une vraie maestria de l’image et du rythme.

Dolls tout en étant d’une beauté plastique indéniable n’est pas par contre un film des plus accessibles pour un public occidental. En effet, le rythme très lent, la symbolique culturelle Japonaise particulière et les dialogues minimaux sont des obstacles possibles, tout comme le cinéma de Wenders pourrait l’être. En terme de tour de force, Kitano a réussit par ce film a confirmer son originalité tout autant que sa maestria. Hana-bi est souvent comparé au Bad Lieutenant de Abel Ferrara, et Dolls rappelle immanquablement Dreams de Kurosawa. Ces références sont aux antipodes l’une de l’autre, et c’est certainement ce qui fait que Kitano est au centre des attentions, et que ces derniers films se voient régulièrement nominés dans les plus grands festivals du monde.


Image
Dolls nous est présenté au format respecté de 1.85:1 dans un transfert 16:9.

Film récent, tourné en 35mm, l’interpositif utilisé devait être de bonne qualité puisque aucun défaut apparent n’a été constaté. Néanmoins, comme cela arrive parfois pour les éditions Seville, la définition générale semble souffrir d’une douceur excessive de l’image, qui prive l’ensemble de netteté. Ce manque de netteté n’est pas vraiment un problème, mais après les récentes éditions DVD à l’image de qualité quasi photographique, et pour un film dont l’essence tient à la beauté des images on ne peut que regretter cette présentation. Les textures et détails sont d’un niveau correct, mais là encore limité par la douceur généralement constatée.

Le point fort de ce transfert est réellement sa gestion des couleurs. Les couleurs sont d’une saturation et d’une naturalité exemplaire, même si certains accents sur le rouge pourraient avoir une incidence forte sur un support vidéo dont le «red push» n’a pas été ajusté. Aucun débordement n’a été constaté et l’étalonnage est parfait, offrant des couleurs constantes durant toute la durée du programme. La brillance et les contrastes sont eux aussi d’un excellent niveau, que ce soit dans les scènes à fond noirs pour le théâtre, tout autant que pour les scènes ensoleillées et dans la neige. À ce propos, les noirs présentent des dégradés de bonne qualité offrant suffisamment de détails, tout en étant d’une profondeur insondable lorsque nécessaire.
La partie numérique ne semble pas présenter de défaut, aucun macroblocs ou parasites n’ont été constatés. Aucun problème de surdéfinition des contours n’a été relevé.

Cette édition ne réussit pas toujours à convaincre malgré des efforts remarqués sur les couleurs et la partie numérique. Il est dommage que ce film, si profondément orienté vers l’image ne puisse se voir dans des conditions parfaitement optimales.



Son
Une seule bande son est proposée, à savoir la version japonaise originale en Dolby Surround 2.0. Quitte à conserver seulement la bande son originale, il est dommage qu'il ne s'agisse pas du mixage Dolby Digital 5.1. Des sous-titrages sont offerts en français et en anglais.
On regrette ce choix, surtout que l’onirisme des scènes se serait magnifiquement prêté à un environnement en format multi-canal. Après le combat pour les images au format respecté, est-ce que cette lutte doit-être étendue au domaine audio dès qu’il s’agit d’un film étranger ?

Le déploiement à l’avant est d’une qualité convenable, quoi que restreinte à la stricte distance entre les enceintes. Une bonne précision du mixage offre néanoins une image fantôme centrale de bonne qualité, centrant les dialogues au mieux. Les effets de transition droite-gauche quoi que rare sont convaincant, et savent insuffler un dynamisme et un positionnement des éléments sonores adéquat. Les dialogues sont très bien rendus, toujours très naturels et parfaitement intégrés aux scènes. La trame sonore est d’une belle qualité, même si elle nous a semblé manquer un peu de dynamisme sur les orchestrations classiques. Les basses quoi que adéquates ne descendent pas très bas, ce qui explique certainement ce manque d’amplitude sur les passages audio les plus compliqués.

C’est donc une déception que de voir la version originale multi-canal tronquée par une version stéréo, surtout considérant qu’il ne s’agit pas d’un doublage et qu’aucune contrainte technique du support ne peut être imploré. Une fois le deuil de la version originale fait, on trouve une honnête bande-son, qui sans toutefois magnifier les images, sait les accompagner sobrement.


Suppléments/menus
Cette édition DVD de Dolls est offerte en un seul disque double couche. Aucun supplément n’est offert, pas même une bande-annonce.

Là encore on peut s’interroger, car certaines éditions offrent pléthore de supplément pour ce film, ce n’est donc pas leur absence qui est à la source de ces limitations. On aurait aimé avoir des interviews de Kitano, d’explication du symbolisme japonais pour les occidentaux, de la présentation du Théatre Bunraku et de tous ces éléments qui font que le Japon se révèle doucement à travers les films qui en parle, et nous oblige à repenser ce qui semble tout le temps acquis. Dommage.



Conclusion
Dolls de Kitano va certainement permettre à ce réalisateur de s'imposer comme un des grands contemporains. Sa maîtrise de la réalisation doublé d'un sens de la poésie en image sont tout entier révélés dans ce très beau film.

Voilà une édition moyenne; une image souvent trop douce, une bande-son au format Dolby 2.0 Surround et l'absence absolue de supplément rendent ce produit certainement perfectible.
Il est dommage que Séville, victime d'un marché plutôt limité, ne puisse investir plus. Une situation compréhensible mais toujours regrettable.


Qualité vidéo:
3,0/5

Qualité audio:
2,8/5

Suppléments:
0,0/5

Rapport qualité/prix:
3,0/5

Note finale:
2,8/5
Auteur: Thomas Geffroyd

Date de publication: 2004-07-04

Système utilisé pour cette critique: Téléviseur Sony KV34XBR910; Préampli Audio Refinement par YBA Pre-2; Ampli Audio refinement par YBA Multi-5; Enceintes JmLabs; Sub REL Strata III; Lecteur DVD Denon DVD-1600; cables et interconnects Cardas/Audioquest.

Le film

Titre original:
Dolls

Année de sortie:
2002

Pays:

Genre:

Durée:
113 minutes

Réalisateur (s):

Acteur (s):

Le DVD / Blu-ray

Pochette/couverture:

Distributeur:
Films Séville

Produit:
DVD

Nombre de disque:
1 DVD-9 (simple face, double couche)

Format d'image:
1.85:1

Transfert 16:9:
Oui

Certification THX:
Non

Bande(s)-son:
Japonaise Dolby 2.0 Surround

Sous-titres:
Français
Anglais

Suppéments:
-

Date de parution:
2004-07-27

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